La minorité (PLR, PDC, PBD), soutenue par le Conseil fédéral (et economiesuisse), proposait d’entrer en matière. Le dossier va passer maintenant au Conseil des États.
Il ne faut pas supprimer l’obligation de reprendre tous les contrats de travail en cas de faillite
Un des principes cardinaux du droit du contrat de travail est l’obligation faite à tout repreneur de reprendre tous les salarié(e)s aux mêmes conditions, y compris s’il s’agit d’une entreprise en faillite (art. 333 CO). Cette règle revêt une importance capitale en pratique, notamment dans l’industrie. Elle permet d’éviter que les conditions de travail ne soient dégradées par le simple fait du changement de propriétaire. La suppression de l’obligation de reprendre tous les contrats de travail en cas de faillite aurait donc été un coup très dur pour les salarié(e)s concernés. L’USS fera en sorte que ce principe soit maintenu. De ce point de vue, le refus de l’entrée en matière est une excellente nouvelle.
Plans sociaux : une contrepartie incertaine et insuffisante
Le Conseil fédéral propose, en contrepartie, l’obligation de conclure un plan social dans les grandes entreprises. L’USS avait certes revendiqué une telle mesure à maintes reprises. Mais la version proposée ne pouvait pas la satisfaire, car l’introduction des plans sociaux, comme prévu dans le projet rejeté par le Conseil national, ne compenserait pas la perte de l’obligation de reprendre tous les contrats. En effet, comme elle ne s’appliquerait qu’aux entreprises d’au moins 250 salarié(e)s, cette obligation de plan social n’aurait qu’une portée pratique restreinte. En outre, il n’est de loin pas sûr que la majorité bourgeoise du Parlement fédéral aurait accepté pareille contrepartie, bien qu’elle soit modeste, car les milieux patronaux y sont très hostiles. Il n’était donc pas exclu que l’obligation de reprendre les contrats de travail en cas de faillite soit supprimée sans compensation aucune. Dans ce cas, les salarié(e)s auraient été perdants sur les deux tableaux.
Il n’en demeure pas moins que l’introduction d’une obligation de négocier et de conclure un plan social reste nécessaire, tant la protection des salarié(e)s contre les effets négatifs des licenciements collectifs est lacunaire en Suisse, surtout lorsqu’on la compare aux pays voisins. L’USS n’abandonnera donc pas cette revendication pour autant.
Il y a encore du pain du sur la planche pour juguler les faillites en chaîne
Le projet de révision de la LP contient enfin une lacune importante qui justifie que le Conseil fédéral revoie sa copie : il ne contient en effet aucune mesure pour juguler les faillites abusives en chaîne, phénomène de plus en plus fréquent, notamment dans le bâtiment et les arts et métiers. En effet, des employeurs peu scrupuleux se déclarent en faillite pour éviter d’avoir à payer salaires, fournisseurs et charges sociales. Puis, ils refondent presque immédiatement, et sous une autre raison sociale, une entreprise qui déploie la même activité, souvent avec le même personnel. Cette «nouvelle» entreprise ne tarde pas à faire faillite à son tour en laissant des salaires, des factures et des cotisations sociales impayés, et ainsi de suite... À chaque fois, les pertes sont en grande partie mises à la charge de la collectivité, en particulier de l’assurance-chômage. Ces faillites abusives en chaîne peuvent aussi provoquer d’autres faillites subies, cette fois-ci, par les créanciers honnêtes, par exemple les fournisseurs. Lors d’une nouvelle mouture de la révision de la LP, il conviendra par conséquent d’apporter une réponse ferme à ces abus.