Malheureusement, le Conseil fédéral s’arrête au beau milieu du gué. En effet, les sanctions proposées sont bien trop faibles : selon le projet mis en consultation, les licenciements antisyndicaux ne donneront droit qu’à une indemnité d’au maximum 12 mois de salaire (contre 6 actuellement), et ils ne pourront toujours pas être annulés. Les employeurs peu respectueux des droits des travailleurs et du partenariat social pourront donc continuer à se débarrasser de leurs employés qui défendent leurs collègues, car une indemnité maximale de douze mois n’est guère dissuasive, en particulier pour les grandes entreprises. Les représentant(e)s du personnel et les syndicalistes qui seront victimes d’un licenciement abusif continueront donc à perdre définitivement leur emploi. Ils n’auront aucun droit à être réintégrés et tomberont donc au chômage ou ne pourront plus faire valoir leurs droits sur leur lieu de travail.
L’USS exige donc l’introduction de sanctions dignes de ce nom en particulier l’annulation du congé et la possibilité de réintégrer les personnes abusivement licenciées. Des mesures plus déterminées sont nécessaires, car, ces derniers mois, le nombre de licenciements abusifs de représentant(e)s du personnel ou de syndicalistes a dramatiquement augmenté, dans toutes les branches et régions du pays.
Deux progrès quand même
Il y a malgré tout deux autres progrès à relever dans le projet mis en consultation. D’une part, les règles du licenciement abusif ne seront plus « absolument impératives », mais pourront être modifiées en faveur des travailleurs et travailleuses dans des conventions collectives de travail. D’autre part, les représentant(e)s du personnel élus ne pourront plus être licenciés pour des motifs économiques, mais uniquement pour des motifs inhérents à leur personne. Cette proposition corrige une jurisprudence récente du Tribunal fédéral, qui donnait pratiquement carte blanche aux employeurs souhaitant licencier un représentant du personnel. Selon cette jurisprudence discutable, un employeur estimant que la situation de son entreprise « pourrait éventuellement se dégrader à moyen terme » peut licencier un représentant du personnel pour motif économique. Il était grand temps de corriger cette situation.
Afin que cette consultation donne de bons résultats et aboutisse à des progrès tangibles en matière de protection contre le licenciement abusif, il est nécessaire de ne pas relâcher la pression sur les autorités et les organisations patronales. L’USS et ses fédérations continueront donc de dénoncer systématiquement tous les cas de licenciements antisyndicaux. Et, si ce projet de loi n’aboutit pas à un résultat satisfaisant, l’USS demandera à l’OIT de condamner à nouveau la Suisse. En effet, la protection contre le licenciement antisyndical fait partie des normes fondamentales du travail, que la Suisse, pays hôte de l’OIT, se doit de respecter et de promouvoir.