L'UDC fait sa propagande pour l'initiative anti-droits humains ("initiative pour l'autodétermination") comme si la protection des salaires suisses lui tenait soudainement à cœur. Et elle abuse d'une citation de l'ancienne conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey en la sortant complètement de son contexte pour prétendre à tort que l'initiative de l'UDC peut défendre la protection salariale.
C'est non seulement faux, c'est aussi hypocrite.
Depuis le début, l'UDC a toujours combattu les mesures d'accompagnement pour protéger les salaires suisses. L'acceptation de l'initiative de l'UDC n'apporterait absolument rien à la protection salariale.
La plus grande menace pesant actuellement sur la protection des salaires n'émane pas de l'UE, mais des milieux helvétiques qui aimeraient volontiers l'abaisser au niveau européen, à commencer par les conseillers fédéraux radicaux.
En politique intérieure, les syndicats se sont battus pour les mesures de protection des salaires. A l'avenir aussi, c'est la politique interne qui continuera à être déterminante pour la protection salariale en Suisse.
L'initiative de l'UDC menace les droits humains. Les droits élémentaires des travailleurs et travailleuses et des syndicats font aussi partie des droits humains. La liberté d'association est un droit humain. La liberté de s'associer syndicalement est un droit humain. Les droits humains se caractérisent par le fait qu'ils ne s'arrêtent pas aux frontières d'un pays. Il s'agit du plus grand acquis de notre civilisation.
La Suisse est un Etat de droit. Mais dans de nombreux pays, les droits de l'homme - dont en particulier les droits des travailleurs et travailleuses et des syndicats - ne sont pas garantis. Fixer des règles nationales primant sur les droits humains, comme l'a fait Poutine, serait un signal fatal pour la Suisse. L'UDC ne fait rien d'autre : son initiative cible un arrêt du Tribunal fédéral fondé sur les droits de l'homme. Il s'agit donc d'une initiative contre nos propres juges.
Les droits humains, en particulier les droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme, ont apporté d'innombrables avancées aux citoyen-ne-s suisses.
La Convention des droits de l'homme a joué un rôle décisif dans l'octroi du droit de vote aux femmes en 1971 (les citoyennes d'Appenzell Rhodes-Intérieures ont attendu jusqu'en 1991). Mais les droits humains ont aussi été déterminants dans de nombreux cas individuels. Ce n'est qu'à la suite d'un jugement rendu à Strasbourg que la veuve d'Hans Moor, installateur de turbines chez ABB décédé d'une grave maladie pulmonaire liée à l'amiante, a pu faire valoir ses droits. Auparavant, un délai de prescription avait toujours été invoqué, malgré la cause avérée de la maladie.
Les droits humains sont un acquis décisif pour les citoyen-ne-s suisses. Les affaiblir nuit justement aussi aux salarié-e-s.
Mais c'est en Suisse que la bataille pour la protection salariale doit être gagnée. C'était ainsi dans le passé, et cela doit rester comme cela à l'avenir.