Une bonne moitié des travailleuses et travailleurs suisses sont exposés à des risques psychosociaux ou autres d’origine professionnelle. C’est ce que montre l’Enquête européenne sur les conditions de travail (EWCS).
L'étude publiée aujourd'hui montre qu'en matière de stress lié au travail, les chiffres ont quasiment doublé depuis l’étude sur le stress du SECO datant de 2000 : à l’époque, la part des personnes se sentant (très) souvent stressées n’était « que » de 27 %. La situation avait déjà bien changé en 2010 : un tiers de la population active suisse (34 %) faisait alors état d’un stress fréquent ou très fréquent.
Une majorité des employé-e-s suisses ont signalé des contraintes exercées sur leur appareil locomoteur (55 %) et un rythme de travail élevé (59 %). La nouvelle étude publiée par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) et la Commission fédérale de coordination pour la sécurité au travail (CFST) constate qu’en Suisse, la protection de la santé au travail est faible. On y voit également que beaucoup de salarié-e-s se plaignent de problèmes de santé tels que maux de dos, douleurs musculaires et maux de tête. L’intensité élevée du travail et les contraintes subies par l’appareil locomoteur sont principalement en cause ici.
L’EWCS révèle encore qu’en Suisse, beaucoup de personnes doivent faire des heures supplémentaires pour satisfaire aux exigences de leur poste de travail. D’où un stress et un surmenage qui sont préjudiciables à la santé. Toujours selon l’EWCS, la protection de la santé au travail doit être améliorée en Suisse. Enfin, selon les différentes enquêtes consacrées à la prévention des risques et à la protection de la santé au travail, la Suisse affiche des résultats très moyens dans ces domaines.
L’heure n’est pas à une nouvelle dégradation, mais à l’amélioration du droit en vigueur
Au vu des chiffres qui précèdent, il est choquant de voir que le Parlement fédéral va se pencher sur toute une série d’interventions qui démantèleraient encore plus la protection de la santé au travail.
On peut penser ici aux interventions visant à démanteler dans la loi sur le travail la protection contre les risque psychosociaux (protection contre le stress), comme la motion du conseiller national Dobler qu’examinera la CER du Conseil national le 28 août. Ou à celle du conseiller aux États Thierry Burkart, qui utilise le travail à domicile comme prétexte pour introduire le travail de nuit et du dimanche au bureau.
De telles incitations sont particulièrement perverses en Suisse où l’on travaille déjà très longtemps et où en dépit de gains de productivité substantiels, la durée du travail n’a pas diminué ces dernières années. Cette évolution, combinée à la faible protection de la santé, a entraîné une véritable épidémie de cas d’épuisement professionnel. Jusqu’en 1990, la durée normale du travail diminuait d’une à deux heures par décennie – pour un salaire inchangé. Depuis lors, les travailleuses et travailleurs doivent financer de leur propre poche les aménagements horaires rendus nécessaires par le stress ou par leur état de santé – une activité à temps partiel étant synonyme d’un moindre salaire. C’est particulièrement frappant dans les activités d’encadrement des personnes dépendantes ou encore dans les métiers de l’enseignement.
Les femmes enceintes sont elles aussi particulièrement mal protégées en Suisse : il leur faut souvent se mettre en congé de maladie, parce que leur employeur ne prévoit aucune mesure de protection pour elles. Plus généralement, les absences pour cause de maladie entraînent une grave perte de revenu pour tous les travailleurs et travailleuses n’ayant pas d’assurance d’indemnités journalières contre la maladie.
Au vu des chiffres alarmants de l’étude EWCS, l’USS appelle le Parlement à refuser toute détérioration de la loi sur le travail. Au contraire, l’heure est venue de se prononcer sur une meilleure protection face aux risques psychosociaux au travail, de renforcer la protection des travailleuses enceintes et d’introduire une assurance d’indemnités journalières en cas de maladie à la fois obligatoire et universelle.