Dans le domaine des soins et de l'assistance (" care "), toujours plus d'emplois sont créés, si bien que l'État doit davantage intervenir, ainsi que les hommes.
Bien que toujours plus nombreuses à exercer une activité lucrative, les femmes fournissent aujourd'hui encore aussi la majeure partie du travail non rémunéré de soins et d'assistance destiné non seulement aux enfants, mais également à des parents âgés et malades. Ces activités constituent une partie obscure de l'économie. Tant qu'elles sont gratuites, elles n'apparaissent pas dans les statistiques économiques. À cela s'ajoute qu'elles n'obéissent pas à la logique de l'efficience omniprésente dans l'économie. De fait, si nous pouvons fabriquer toujours plus rapidement des automobiles, impossible de consoler des enfants ou d'assister des malades de manière plus efficiente.
Une offre lacunaire
Mais les femmes ne sont plus d'accord d'assumer sans condition ces tâches et d'en porter le risque financier. Comme l'espérance de vie augmente, les activités de soins et d'assistance gagnent en importance, toujours moins de femmes renonçant sur la durée à un salaire et une sécurité financière propres pour fournir ce travail " accompli par amour ", dit-on. Et les hommes ne fournissent pas une quantité de travail non rémunéré plus grande que celle de travail rémunéré réalisée par les femmes. Une lacune est donc apparue dans les soins et l'assistance destinés aux enfants et aux personnes dépendantes de soins. Une lacune qui s'accentuera si nous ne redressons pas la barre.
Une protection lacunaire pour les migrantes concernées
Les institutions comme les crèches, les hôpitaux, les soins à domicile ne sont déjà plus en mesure aujourd'hui de combler cette lacune. En raison de la pression aux économies, les soins prodigués aux personnes âgées et malades sont précisément toujours plus repoussés vers le secteur privé. Et des femmes s'engouffrent de nouveau dans la brèche. Les migrantes actives dans les tâches de soins et d'assistance laissent leurs familles au pays pour, dans des conditions de travail précaires et pour un salaire de misère, s'occuper 24 heures sur 24 en Suisse de " parents étrangers ". Le travail au noir est ainsi à l'ordre du jour. Dans de tels arrangements avec les employeurs, la sphère privée et le temps libre sont la plupart du temps des notions qui n'ont pas cours. Bien que la Suisse ait ratifié la convention n° 189 de l'Organisation internationale du Travail (OIT) " sur les travailleuses et travailleurs domestiques " et bien que le Conseil fédéral ait avoué, dans un rapport, qu'il y avait lieu d'agir dans ce domaine, les activités de soins et d'assistance rémunérées ne sont toujours pas soumises à la loi sur le travail. Par conséquent, il manque aux travailleuses concernées une protection efficace de leur santé et de leur intégrité personnelle.
Une protection quasi nulle, malgré une convention de l'OIT
Dans les activités de soins et d'assistance, le danger d'exploitation, de violence ainsi que de sous-enchère sociale et salariale est considérable. C'est pourquoi la convention n° 189 de l'OIT exige qu'en matière de législation du travail et sociale, les travailleurs et travailleuses domestiques soient mis sur pied d'égalité avec les autres employé(e)s. Selon cette convention, des améliorations sont nécessaires, surtout sous l'angle du temps de travail, de la sécurité sociale et des conditions de travail (normes minimales de la sécurité au travail et protection de la santé psychique et physique au travail). Il faut en particulier protéger les employées actives dans le domaine des soins et de l'assistance contre les abus (sexuels), le harcèlement et la violence. En Suisse, bien que la convention précitée ait été ratifiée, ces exigences ne sont pas encore suffisamment remplies. Ainsi, par exemple, les inspectorats du travail n'effectuent aucune visite au travail des personnes actives dans ce type de tâches.
L'État doit davantage investir
La Suisse doit prendre conscience que les activités de soins et d'assistance ne sont pas quelque-chose de privé, mais une tâche nécessaire à la société et sans laquelle l'économie s'effondrerait. Nous avons d'urgence besoin de redéfinir qui fait quoi. La collectivité doit assumer sa responsabilité et investir des ressources dans les places d'accueil des enfants, les établissements de soins, mais aussi dans la fourniture de soins et d'aide à la maison. Les tâches de soins et d'assistance doivent être soumises à la loi sur le travail. Il faut absolument prévoir des temps de travail et de repos réglementés, de même que des salaires minimaux. Quant au reste, il faut le répartir équitablement entre les femmes et les hommes.