« Du jamais vu en Suisse […] une décision anticonstitutionnelle et sans valeur, mais néanmoins très grave : c’est en effet un acte dangereux contre les droits des travailleurs de l’ensemble du Canton du Tessin ». Les termes dans lesquels est rédigée la résolution de l’union syndicale tessinoise a des accents dramatiques. Car c’est la réalité qui est ainsi. Mais reprenons tout cela dans l’ordre.
Le 29 novembre 2011, le Conseil d’État tessinois a fait parvenir aux associations du personnel de l’État une lettre dans laquelle il les informait de sa décision concernant les activités syndicales dans l’administration cantonale. Dans sa missive, le gouvernement stipule que les syndicats du personnel de l’État n’ont fondamentalement plus le droit d’accéder aux bâtiments du canton pour leurs activités syndicales. Et si les syndicats souhaitent utiliser une salle de l’administration pour y aborder, en dehors des heures de travail, des thèmes concernant le personnel de l’État, ils devront désormais disposer d’une autorisation délivrée par la Chancellerie cantonale. Enfin, la distribution d’informations syndicales devra passer par les services cantonaux de l’information et de conciergerie.
Cette décision est en contradiction avec la Constitution. L’avocat Arthur Andermatt, spécialiste de ces questions, affirme sans équivoque aucune que « De la liberté de coalition garantie par la nouvelle Constitution fédérale se déduit aussi le droit des syndicats à accéder aux entreprises. » (trad. USS). Selon lui, les limites à l’activité de recrutement syndical dans l’entreprise sont uniquement que le bon fonctionnement de cette dernière ne doit pas être dérangé par cette activité. Le droit d’informer et le droit de recruter s’appuient directement sur la Constitution, ces activités syndicales sont donc protégées. Jean Christophe Schwaab, spécialiste du droit du travail et secrétaire central de l’USS, constate que « Cette décision du gouvernement tessinois est d’autant plus incompréhensible que l’on est en droit d’attendre des pouvoir publics qu’ils témoignent de plus de sensibilité à l’égard du partenariat social. »
Pour l’USS, il est donc clair que le gouvernement tessinois doit revenir sur cette décision scandaleuse. C’est aussi ce que demande le Syndicat suisse des services publics, le ssp, directement concerné ici et soutenu par l’OCST (syndicat chrétien) ainsi que le CCS (organisations des fonctionnaires radicaux). Le ssp a aussi chargé un avocat de faire recours contre cette décision.
Mais comment le gouvernement cantonal tessinois a-t-il bien pu en arriver là ? « Le « mobile du crime » n’est un secret pour personne. En effet, en 2010, le ssp avait distribué au Tessin des tracts contre la proposition d’introduire le salaire au mérite dans une nouvelle loi sur le personnel de l’État. Ensuite, les citoyens et citoyennes tessinois avec sèchement rejeté ce projet cantonal…