La privatisation totale de PostFinance proposée aujourd’hui par le Conseil fédéral est totalement inacceptable. Cette décision non seulement sape la mission de service universel dans le domaine du trafic des paiements, mais est une attaque frontale dirigée contre le service public en général. Les syndicats combattront fermement ce projet.
PostFinance est une banque populaire qui compte presque 3 millions de client-e-s et appartient – car faisant partie du groupe La Poste – à la collectivité. Dans le domaine du trafic des paiements, elle a une mission de service universel, qu’elle assume avec succès depuis des années. La décision prise aujourd’hui par le Conseil fédéral en faveur d’une privatisation totale de PostFinance ne revient cependant pas seulement à saper les fondements de ce mandat de service universel, mais provoquerait de facto un éclatement de l’ensemble du groupe La Poste. La Poste ne fonctionne aujourd’hui qu’avec un modèle commercial homogène comportant de nombreuses interdépendances internes et financières et, en particulier, les effets de synergie du réseau postal. Si la Confédération, ou la Poste, devait totalement se retirer de PostFinance, le service universel devrait, pour le trafic des paiements, être garanti à travers l’octroi d’une concession. Tant la rentabilité que la qualité de l’approvisionnement en souffriraient énormément, et notamment aussi les conditions de travail du personnel de La Poste.
Mais la privatisation totale de PostFinance proposée, c’est plus que cela. Il s’agit en effet d’une attaque frontale éhontée contre le service public en Suisse. La crise du coronavirus a justement montré à quel point les prestatairespublics du service universel sont essentiels au bon fonctionnement de l’ensemble de l’économie. On voit de manière impressionnante, par exemple à travers le record du nombre des colis traités par la Poste suisse, à quel point cette mission est accomplie comme il se doit : pendant l’année 2020, en tout 183 milliards de paquets ont été livrés dans toutes les villes, villages et vallées du pays ! Un record historique, presque un quart de plus que l’année précédente. Mais cette mission n’a pu être accomplie que grâce à une grande aptitude à s’adapter au plan organisationnel et à l’énorme engagement dont a fait preuve le personnel. Pour pouvoir venir à bout à long terme de telles exigences, il faut toutefois bien plutôt un solide développement du service public, c’est-à-dire, dans ce cas, de l’acheminement des colis.
Depuis la crise financière, PostFinance doit respecter les directives de la FINMA qui s’appliquent à toutes les grandes banques d’importance systémique (« too big to fail ») ; mais cela, sans avoir, en matière de crédits, la marge de manœuvre commerciale d’une grande banque. Cette situation défendue depuis des années par le lobby financier est totalement absurde. Comme PostFinance appartient à la Confédération, celle-ci aurait dû tout simplement lui octroyer une garantie, comme le font les cantons avec leurs banques cantonales. Mais au-delà, il faut aussi que soit levée l’interdiction faite depuis des années à PostFinance d’octroyer des crédits hypothécaires. Mais surtout pas en combinant cela avec une privatisation, suite à laquelle, tant les anciens revenus que les nouveaux qui auront été générés tomberaient exclusivement dans la poche d’investisseurs privés, et non de la collectivité. Cela reviendrait à sauver quelqu’un qui est tombé dans un torrent, pour le jeter ensuite du haut des rochers.