Sous les drapeaux, la lutte et l’expo

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Écrit par Yves Sancey, rédacteur du journal de Syndicom

Histoire des syndicats : exposition de drapeaux à Lausanne

À partir d’une collection unique en Suisse, l’exposition en cours à l’Espace Arlaud raconte les organisations ouvrières vaudoises. Une occasion unique de découvrir des bannières syndicales du milieu du XIXe siècle à nos jours, jusqu’au 25 janvier prochain.

Cet article d'Yves Sancey est paru dans le journal de syndicom n° 13 du 7.11.2014, dont il est le rédacteur.

Au départ, il y avait le drapeau. Pièce d’étoffe attachée à une hampe flottant au vent pour attirer le regard. Symbole d’identité et de reconnaissance, un outil pour transmettre des messages, rallier les hommes et les femmes et éveiller les émotions. Au départ, il y avait beaucoup de drapeaux. Une collection exceptionnelle de 46 drapeaux remis aux archives par Unia, réparés, bichonnés et enfin exposés. Vraiment exceptionnelle ? « Par le nombre et la durée couverte, de 1873 à 2004. Par la diversité des professions et des branches, par la qualité des pièces, l’iconographie toujours typique et riche, que ce soit avec des outils, des motifs symboliques ou des saynètes », répond Patrick Auderset, l’un des deux commissaires de l’exposition. « Nous avons cherché à retrouver de la documentation, voir ce que disaient les drapeaux, et quelles étaient les conditions de travail et de vie à leur époque », relève Marianne Enckell, la seconde. Tous ne sont pas exposés, mais d’autres syndicats, comme les typos et les postiers, ont prêté leurs étendards.

Mise en contexte

C’est une occasion unique de revenir sur l’histoire ouvrière vaudoise en s’appuyant sur ces magnifiques bannières reflétant les identités syndicales. Pour Auderset, « il ne s’agit pas juste d’une succession de drapeaux, mais de les mettre en contexte ». Par leurs symboles et leurs devises, ces bannières véhiculent les principales valeurs du mouvement ouvrier, de son émergence dans la seconde moitié du XIXe siècle à ses mutations les plus récentes. Au fil d’un parcours soigné et intelligemment didactique, on découvre ces étendards ouvriers vaudois, témoignages d’une époque où la soie brodée remplaçait avantageusement le polyester imprimé. Les premiers drapeaux témoignent de la formation d’une identité spécifique et de la volonté de la manifester dans l’espace public, d’abord en catimini, puis de manière de plus en plus affirmée.

Drapeaux rouges

« En 1890 est célébré le premier 1er Mai. C’est le moment où le mouvement ouvrier syndical, mais aussi politique, se développe vraiment. Beaucoup de drapeaux sont fabriqués depuis cette époque-là », explique Patrick Auderset. À partir de la dernière décennie du XIXe siècle, les drapeaux – désormais rouges pour la plupart et plus nombreux – sont de tous les rassemblements ouvriers, qu’ils soient syndicaux, politiques, culturels ou autres. Ils proclament fièrement l’appartenance de classe et revendiquent une société nouvelle, basée sur la solidarité et la justice sociale.

Les typos lausannois sont sans doute les premiers syndiqués à se doter d’un drapeau rouge. Le coût est conséquent, quatre ou cinq mois de salaire. Une soirée récréative avec tombola est alors organisée. On peut admirer un drapeau rouge de la section de Lausanne de la Fédération suisse des employés des postes et télégraphes de 1924. L’exposition présente par ailleurs une pièce rare de la Commune de Paris (1871). Un petit film sur la piscine de Bellerive dans les années trente permet une mise en contexte de l’entre-deux-guerres.

Nouvelle culture du logo

Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, les drapeaux se font moins revendicatifs, les slogans « L’Union fait la force » ou « Soyons unis – soyons forts » disparaissent progressivement pour laisser la place au nom du syndicat et à son sigle. En lien avec les fusions syndicales, une nouvelle culture se développe autour du logo. La volonté d’être visible dans l’opinion publique.

Banderoles et pancartes font également leur apparition dès les années septante, permettant à d’autres composantes du mouvement ouvrier, femmes et migrants, de s’exprimer. Logiquement, le drapeau, instrument du changement social, en est aussi le reflet. L’exposition se clôt d’ailleurs sur des photos, drapeaux et banderoles exprimant cette nouvelle culture de l’emblème. 

Catalogue d’expo

Un catalogue, richement illustré et relatant la genèse de l’exposition, la place des drapeaux dans l’histoire, leur signification, leur conservation, a été rédigé par Marianne Enckell et Patrick Auderset ainsi que d’autres spécialistes. Il recense également tous les drapeaux de la collection Unia. Le livre est disponible au prix de 20 fr. à l’Espace Arlaud et à la boutique du Palais de Rumine. Il peut aussi être commandé auprès du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire ou par courriel à mcah@vd.ch, ainsi qu’auprès de l’Aehmo, case postale 5278, 1002 Lausanne ou sur le site www.aehmo.org.

Infos pratiques

L’exposition « Sous le drapeau syndical, 1845-2014 » est ouverte jusqu’au 25 janvier 2015.

Lieu : Espace Arlaud, place de la Riponne 2bis, Lausanne

Horaires : lundi et mardi fermé ; mercredi à vendredi de 12 h à 18 h ; samedi, dimanche et jours fériés de 11 h à 17 h. Entrée libre jusqu’à 16 ans. Entrée libre pour tous les premiers samedis du mois. Prix entre 4 et 6 fr. Infos : www. musees.vd.ch/espace-arlaud 

Responsable à l'USS

Daniel Lampart

Premier secrétaire et économiste en chef

031 377 01 16

daniel.lampart(at)sgb.ch
Daniel Lampart
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