Le 11 mars dernier, la population s’est clairement prononcée dans les urnes contre de nouvelles subventions pour l’acquisition du logement propre. Mais l’association des propriétaires fonciers ne s’en émeut guère : le 17 juin, nous devrons en effet déjà voter sur une initiative également favorable à l’épargne-logement.
Des idées stupides ne peuvent pas devenir tout à coup géniales uniquement parce qu’on les répète suffisamment longtemps. Or, deux mois seulement après la nette défaite de la dernière initiative sur l’épargne-logement, nous devons nous en coltiner une nouvelle. On a presque l’impression que la volonté populaire ne pèse guère pour les amis des logements propres subventionnés destinés aux nantis. Mais cela correspond tout à fait à leur souhait : les contribuables devraient subventionner leurs maisons. Nous sommes donc au moins assez bons pour passer à la caisse.
Remettons-nous en mémoire ce qu’est l’épargne-logement : qui économise de l’argent pour son propre logement n’a pas à payer d’impôts sur les montants économisés. Dans la présente variante, ces montants peuvent aller jusqu’à 10 000 francs par an et personne. Autrement dit : quiconque peut mettre 800 francs de côté par mois pour les placer sur un compte épargne-logement profitera en plus d’une remise fiscale pour cela. Tous les contribuables en supporteront les coûts et, dans leur grande majorité, ce sont des locataires…
Le deuxième essai des partisans de ces subventions pour les nantis montre clairement avec quelle énergie certains continuent à favoriser un partage des richesses du bas vers le haut. Il montre aussi la perfidie avec laquelle ils agissent dans ce but. Ces projets sont vendus avec le rêve de devenir soi-même aussi un jour le bénéficiaire de pareils privilèges. Et c’est aussi le cas de cette deuxième initiative. Avec le dessin fait par un enfant d’une famille heureuse devant sa maison, les initiants vont à la pêche aux voix. En nous faisant miroiter que, grâce à l’initiative, nous aurons une vie de famille idyllique entre nos propres quatre murs. Ce serait bien… si c’était vrai.
La réalité est cependant différente. Nombre de familles doivent faire face à une pression financière toujours plus forte, parce que les cantons et les communes ont supprimé certaines de leurs prestations parce qu’ils ont fait des cadeaux fiscaux aux riches ces dernières années. Parallèlement, taxes et émoluments ont augmenté, sans oublier les primes des caisses-maladie ! Le rapport de l’USS sur la répartition des revenus et de la fortune en Suisse fait clairement apparaître que les familles à bas ou moyens revenus n’avaient guère plus d’argent à disposition pour vivre en 2010 qu’en 2000. Les grands profiteurs ont été les hauts revenus, précisément ceux dont la charge diminuerait grâce à cette nouvelle initiative sur l’épargne-logement.
Ce partage des richesses des bas et moyens revenus vers les riches et les plus riches parmi les riches doit cesser une fois pour toutes. Le 11 mars dernier, le peuple a fait un pas dans la bonne direction en rejetant dans les urnes la première initiative sur l’épargne-logement. Il s’agit désormais de confirmer cela. Et s’ils construisent leurs maisons, nous ne les payerons pas !