Le feu de l’opposition a longtemps refusé de s’allumer. Mais beaucoup de personnes inquiètes se manifestent enfin et déclarent avec conviction: « Non, ça ne va pas ! Nous nous opposons à cette initiative inhumaine ! » Une nouvelle voix dans ce chœur d’opposants s’est faite entendre, celle d’un comité qui en moins de deux jours a récolté près de 440 000 francs pour financer une campagne d’affichage pour le NON dans toute la Suisse. Un site en français (www.appel-urgent.ch) complétera dans la semaine le site allemand.
« L’UDC souhaite, avec l’initiative dite « de mise en œuvre », affaiblir les droits humains et certaines valeurs centrales de notre Constitution, comme le principe de proportionnalité et la séparation des pouvoirs. Les personnes concernées devraient perdre tous leurs droits et les tribunaux seraient réduits à n’être plus que des automates à expulsion. L’initiative est une attaque directe contre les nombreux secondos qui ont toujours vécu ici ou du moins depuis longtemps. Et contre leurs familles. […] Beaucoup de membres des syndicats et leur descendance sont ici concernés de près. C’est en ces termes que le président de l’USS Paul Rechsteiner avait expliqué le 5 janvier aux médias pourquoi l’USS s’opposait fermement à cette initiative.
L’opposition s’élargit
A l’époque, le front des opposants contre l’automatisme des expulsions voulu par l’UDC était encore ténu. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Exemples :
Le conseiller aux Etats Hans Stöckli et le conseiller national Beat Flach ont lancé un manifeste contre l’initiative. Plus de 270 parlementaires (anciens et actuels) l’ont signé.
- Le syndicat SSP a produit un court film (en allemand seulement) et mène une campagne active avec des tracts et d’autres actions.
- Des comités unitaires réunissant partis, syndicats et associations caritatives ou de migrant-e-s se sont constitués un peu partout, dont par exemple le comité genevois « Stop exclusion ».
- Cent vingt professeurs de droit, réunis derrière Andreas Auer notamment, ont signé un manifeste (en allemand) pour le NON. Ils critiquent surtout l’automatisme des expulsions, interdisant aux juges de prendre en compte les circonstances. Les procureurs se sont eux-aussi joints au débat en lançant un appel au NON.
Le NON aussi visible sur des affiches
Le 24 janvier, le Comité contre l’initiative inhumaine de l’UDC est apparu en public pour la première fois. Environ 25 000 personnes ont signé en deux jours son appel. Ce comité notamment constitué autour de l’ancien rédacteur en chef de la TV alémanique Peter Studer, l’ancien Délégué aux réfugiés du Conseil fédéral Peter Arbenz, la romancière Annette Hug et le président de l’Union syndicale suisse (USS) Paul Rechsteiner a été rejoint par de nombreuses personnalités issue de l’économie, de la société civile, la culture et la communauté scientifique. L’objectif de récolter rapidement 200 000 francs pour une campagne d’affiches a été atteint en quelques heures. Au lieu des 600 affiches initialement prévues en Suisse alémanique, ce seront plus de 1000 affiches qui pourront être placardées dans toute la Suisse. Le reste de l’argent sera investi dans des annonces dans les journaux.
Pas de réflexe conditionné
L’engagement que les signataires montrent est encore plus important que les dons. En signant l’appel, ils montrent qu’ils s’opposent à la propagande de l’UDC. Nous devons utiliser cet élan. Nous ne pourrons gagner cette votation que si de larges cercles de la population montrent clairement leur opposition.
Les attaques récurrentes de l’UDC conditionnent la politique et la réduit à de purs réflexes : A veut forcément dire B, et cela automatiquement. C’est noir ou blanc, la nuance n’y a pas de place. Une condamnation et ouste ! Que l’on soit marié, que l’on ait des enfants et que le délit soit mineur, peu importe. Quand le droit est restreint par de tels réflexes barbares, de tels automatismes, on peut aussi bientôt se passer du droit ! A quand l’initiative de l’autodétermination ?
L’UDC veut une politique des réflexes conditionnés. Et un peuple qui se comporte comme le chien de Pawlow. Au stimulus « délit-étranger » répond : « Expulsion immédiate ». Cela va à l’encontre de la liberté de pensée. Et des droits humains. Voilà pourquoi un NON à l’initiative absolutiste de l’UDC est indispensable. Cela aurait un effet libérateur.