Depuis plus de dix ans, les rentes versées par les caisses de pensions diminuent, alors même que les caisses ont réalisé de somptueux bénéfices sur les marchés boursiers et immobiliers. La situation actuelle dans le 2e pilier est problématique : les avoirs de vieillesse sont faiblement rémunérés et les taux de conversion en baisse constante, tandis que les coûts facturés et les bénéfices engrangés par les caisses de pensions et les assurances ont pris l’ascenseur. Le Parlement aurait eu l’occasion historique de reprendre le compromis négocié par les partenaires sociaux et soutenu par le Conseil fédéral qui comportait des améliorations de rentes rapides et financièrement abordables pour les femmes. À la place, les femmes devront patienter des décennies pour obtenir de meilleures rentes, tout en payant plus cher dès maintenant. Or avec la remontée des taux d’intérêt, il faut désormais se demander comment on pourrait compenser la dépréciation des rentes et des avoirs de prévoyance due au renchérissement, plutôt que de prévoir de nouvelles baisses.
Payer plus cher pour des rentes en baisse : voilà ce que propose le Conseil des États. Les diminutions pourraient atteindre 200 francs par mois pour certains assuré-e-s. Et ce, alors que tous les acteurs impliqués ont promis de maintenir le niveau général des rentes et d’améliorer les rentes des femmes. Pendant ce temps, la situation financière des caisses de pensions s’améliore de jour en jour, avec la reprise des taux d’intérêt. Concrètement, le Conseil des États propose de réduire durablement le taux de conversion et de compenser cette mesure seulement pendant une période transitoire, et de surcroit, uniquement pour une minorité des personnes concernées. À la différence du compromis des partenaires sociaux, les employeurs et les hauts revenus ne participeraient guère aux coûts de la compensation. Ainsi, ce serait aux travailleuses et travailleurs âgés de compenser eux-mêmes la baisse de leurs rentes. Et les plus jeunes passeraient également à la caisse, en voyant leurs cotisations augmenter sans avoir pour autant droit à de meilleures rentes.
La décision adoptée est un véritable affront fait aux femmes. Après que l’âge de la retraite a été revu à la hausse, le Conseil des États veut les faire patienter quelques dizaines d’années avant d’obtenir les améliorations de rentes dont elles ont concrètement et urgemment besoin. Moins de la moitié des femmes – et au total un quart des assuré-e-s – obtiendraient la pleine compensation de la baisse du taux de conversion. Les veuves n’hériteraient même pas du supplément de leur conjoint. Tout le monde s’accorde pourtant à dire que les femmes et les personnes occupées à temps partiel ont un besoin urgent de meilleures rentes à un coût acceptable. Or la décision actuelle du Conseil des États a l’effet exactement l’inverse. Des améliorations de rentes abordables ne sont possibles qu’avec un mécanisme de répartition, comme le prévoyait le Conseil fédéral.