Si le sujet n’était pas si grave, on pourrait parler d’une farce : les modifications à l’AVS décidée par la commission du Conseil des États sont tout simplement surréalistes. L’Union syndicale suisse (USS) a clairement démontré que les femmes perdraient quelque 1200 francs par année si l’âge de la retraite est relevé à 65 ans avec le projet AVS 21. Et maintenant, ce sont les compensations prévues pour les femmes touchées dans l’immédiat par ce changement qui sont ratiboisées ! Et ce, même si les femmes touchent actuellement déjà un tiers de moins de rente de vieillesse que les hommes.
Ces décisions de la commission compétente du Conseil des États sont tout simplement indécentes. Une semaine avant que la Suisse célèbre les 50 ans du droit de vote des femmes, ces messieurs du Conseil des États montrent leur vrai visage : non contents d’avoir demandé la hausse de l’âge de la retraite pour les femmes, ils veulent encore sabrer dans les compensations que le Conseil fédéral a proposées pour les femmes les plus touchées.
Ces compensations telles que le Conseil fédéral les envisageait étaient pourtant déjà honteusement faibles compte tenu de l’écart important des rentes des femmes. L’USS est effarée de voir que la droite en veut encore moins et ne propose littéralement que des miettes aux femmes concernées : il s’agit là d’un véritable aveu de mépris en matière de politique d’égalité.
Jamais les femmes ne se sont vu proposer aussi peu pour compenser une hausse de l’âge de la retraite. Même les femmes qui partiront à la retraite au cours de la mini-phase de transition de six ans pourraient subir des baisses de rentes bien réelles. Et même les 12 % de femmes aux revenus les plus faibles ne seront pas épargnées par les baisses de rentes.
Flexibilisation ? La double peine pour les femmes
Pour la commission, la flexibilisation du départ à la retraite doit passer à la trappe, même si cette mesure est largement soutenue et qu’elle n’engendre pas de coûts supplémentaires à moyen terme. Là aussi, ce sera surtout aux femmes de passer à la caisse : car, si la flexibilisation n’est introduite qu’à partir de 63 ans, il n’y aura aucun changement pour les hommes. Tandis que les femmes seront doublement pénalisées : non seulement leur âge de référence augmente, mais l’âge à partir duquel elle pourront anticiper leur rente AVS aussi.
Déni de réalité
Le seul point sur lequel la commission tient compte des difficultés réelles, c’est avec la hausse du plafonnement des rentes de couples mariés. Car même la rente AVS maximale plafonnée ne suffit plus pour faire face au coûts de la vie en hausse constante. Pour rappel : la moitié des personnes qui sont parties à la retraite en 2018 doit s’en sortir avec moins de 3450 francs par mois. Augmenter le plafond à 155 % de la rente individuelle maximale constitue un pas vers une amélioration des rentes qui devient absolument nécessaire. Mais cette mesure ne bénéficie qu’à une partie des couples mariés. Les personnes seules et les couples mariés ayant des revenus bas ou moyens doivent faire face aux mêmes difficultés. Pour ces personnes, la commission ne prévoit aucune amélioration.
Toute personne mérite une bonne rente après une vie de travail. Président de l’USS, Pierre-Yves Maillard insiste : « Les responsables de la réforme de la prévoyance vieillesse doivent être centrés sur les problèmes réels. Et la solution est simple : nous avons besoin de renforcer l’AVS, pas de la démanteler. Précisément pour éliminer l’écart de rentes des femmes. » Avec les décisions d’hier, la commission du Conseil des États a révélé sont véritable objectif. La suivre reviendrait à aller droit dans le mur avec la réforme de l’AVS.