À moins de quatre mois de la Grève des femmes*, les préparatifs tournent à plein régime : dans toute la Suisse, des collectifs régionaux sont à l'œuvre. Sous le slogan : " Femmes* en grève le 14 juin 2019 : pour plus de temps, plus d'argent et du respect ! ", l'USS et ses fédérations ont récemment adopté une série de revendications qui devront faire avancer sérieusement l'égalité dans le monde du travail.
Il y a longtemps que l'idée d'une journée de lutte des femmes était dans l'air. À l'été 2017, le Conseil fédéral soumet au Parlement une révision de la loi sur l'égalité. Enfin ! Cela faisait trois ans déjà que le même Conseil fédéral avait reconnu officiellement qu'il fallait agir sur le plan législatif pour l'égalité salariale. Les organisations féminines et les syndicats ont dû exercer une forte pression pour que la ministre de la justice Simonetta Sommaruga puisse proposer des mesures concrètes en dépit des fortes résistances lors de la consultation. Le projet était plutôt dilué : il ne prévoyait ni l'obligation de contrôle pour toutes les entreprises, ni sanctions. Et il fallait s'attendre à ce que la majorité de droite l'affaiblisse encore, ou le fasse carrément capoter.
Toute cette lenteur et ce rétropédalage en matière d'égalité salariale, ainsi que la bataille sur la hausse de l'âge de la retraite pour les femmes n'ont fait qu'attiser la colère de nombreuses femmes. À mesure que la parole grondait de plus en plus fort contre le sexisme au quotidien, les premières voix exigeant une nouvelle Grève des femmes* se firent entendre. Surtout en Suisse romande.
Un mouvement bien vivant
Dès le début 2018, les choses se sont enchaînées coup sur coup : des dizaines de milliers de femmes ont manifesté en janvier lors des Marches des femmes à Genève et Zurich pour protester contre le sexisme et exiger l'égalité réelle. Ces femmes ont prouvé qu'en Suisse aussi, le mouvement des femmes est très vivant. En janvier, le Congrès des femmes de l'USS a décidé de transmettre au Congrès de l'USS de décembre 2018 la proposition de soutenir la Grève des femmes* 2019 et d'y prendre une part active.
Dès le mois de juin, des militantes romandes ont entrepris la préparation concrète, avec parmi elles de nombreuses syndicalistes, mais aussi des femmes jusque-là non politisées. Et dès l'été, des rencontres ont eu lieu en Suisse alémanique et au Tessin. La grande manifestation pour l'égalité salariale (#ENOUGH ), qui a rassemblé pas moins de 20 000 personnes au centre de Berne en septembre, a été l'occasion pour le mouvement pour la Grève de femmes* d'attirer haut et fort l'attention sur les projets du 14 juin 2019. L'emballement pour la grève des femmes* 2019 s'est emparé de toute la Suisse.
Manifeste des collectifs romands
Au début de cette année, les Collectifs romands ont publié un Manifeste en dix-neuf points qu'ils avaient élaboré ensemble. Les nombreuses raisons et revendications de la grève que l'on peut lire dans ce manifeste ne laissent pas de place au doute : il faut des changements fondamentaux pour permettre à l'égalité de s'imposer dans toutes les sphères de notre société.
En ce qui concerne le monde du travail, le Comité de l'USS a adopté les objectifs qu'il entend poursuivre dans le cadre de la Grève des femmes*. L'USS a décliné en revendications concrètes les revendications du manifeste des Collectifs romands concernant le monde du travail.
Éliminer le sexisme au travail
Sous le terme " plus d'argent ", l'USS revendique la revalorisation financière et sociétale du travail des femmes. Pour y parvenir, il faut des analyses des salaires dans les entreprises avec contrôles et sanctions, des conventions collectives de travail dans les branches où la proportion de femmes est importante, un salaire minimum de 4000 francs, des réglementations dans la loi sur le travail pour le travail rémunéré dans les ménages privés et des rentes AVS décentes, sans relèvement de l'âge de la retraite.
Le slogan du dernier Congrès des femmes de l'USS était : " Notre temps vaut plus que ça ! ". L'USS reprend cette revendication et exige plus de temps et d'argent pour le travail de soin et d'assistance. Elle demande aussi la suppression du travail sur appel et de l'obligation d'être constamment joignable, ainsi qu'un pensum à plein temps réduit à 30 heures hebdomadaires. Il faut par ailleurs un droit à une réduction provisoire de son taux d'occupation assorti du droit de retrouver son emploi, un congé de maternité de 24 semaines et au moins 8 semaines de congé de paternité, ainsi qu'un congé parental d'au moins 24 semaines, réparties de façon paritaire. Les femmes et les hommes qui s'occupent de leurs proches doivent avoir droit à des congés suffisants et les pouvoirs publics doivent investir substantiellement dans les soins et l'assistance (" care ").
Violences sexistes : tolérance zéro
" Last but not least ", l'USS exige le respect au travail et l'élimination du sexisme. La protection contre le licenciement doit être renforcée en cas de maternité et de soins prodigués à des proches. L'USS exige aussi la tolérance zéro face à la violence sexiste et veut une prévention efficace contre le harcèlement sexuel au travail, ainsi que des dispositions légales adaptées. Le fardeau de la preuve doit être allégé.