8,7 % : telle était en 2012 la différence de salaire inexpliquée entre femmes et hommes. Une différence potentiellement discriminatoire, car justifiée par aucun facteur objectif comme la formation, la position professionnelle, etc. L’Office fédéral de la statistique (OFS) a publié en août dernier son analyse des différences de salaire en fonction du sexe ; cela, comme toujours, après l’Enquête suisse sur la structure des salaires.
Mais cette année, tout est un peu différent. Alors qu’année après année, les chiffres publiés inquiétaient certes, mais n’étaient pas remis en question, cet automne, ils mettent certains milieux en effervescence. La droite, les employeurs, des représentant(e)s de l’économie, secondés avez zèle par les médias, NZZ en première ligne, s’appliquent par tous les moyens à faire planer le doute quant au sérieux du travail de l’OFS. Des experts autoproclamés en matière d’égalité salariale se permettent de qualifier de fumisterie l’analyse de l’OFS et vantent l’exactitude de leurs propres méthodes d’analyse, qui nient bien sûr l’existence de toute discrimination salariale. Désespérément, l’Union patronale suisse publie étude sur étude. La nervosité ambiante est palpable.
Indépendamment du fait que ces méthodes tant vantées manquent totalement de transparence et que leur indépendance scientifique est plus que douteuse, la question de ce dont la droite a tellement peur s’impose lorsque celle-ci évoque le spectre d’une « police des salaires ». Qui connaît le projet de révision de la loi sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) annoncé par le Conseil fédéral afin de combattre la discrimination salariale ne peut que rire de ce concept créé de toute pièce. Le projet de loi ne veut qu’instaurer des contrôles de la structure salariale de chaque entreprise effectués à intervalle régulier afin d’établir s’il y a discrimination ou non. Et l’on ne communiquerait que pour faire savoir si l’entreprise a réussi ou non le contrôle. Les détails resteraient secrets. Si même ce tout petit peu de transparence – qui progresse aussi en Europe –, c’est encore trop pour la droite, on peut en conclure qu’elle a quelque-chose à cacher. Les patrons veulent continuer à empêcher que l’on consulte les fiches de salaire. En même temps, ils prétendent que tout est en ordre chez eux. Or si c’était effectivement le cas, ils pourraient tranquillement voir venir le projet de révision de la LEg et faire attester publiquement qu’ils sont blancs comme neige…
Mais les employeurs préfèrent tirer à boulets rouges contre l’analyse, reconnue, de régression et en dénigrent les résultats. Il faut y voir un combat défensif dirigé contre une LEg plus efficace. Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage. Afin de ne pas devoir avouer qu’il y a peut-être bien un problème avec les salaires qu’ils versent à leurs employées.