Les cantons ont désormais tous publié leur budget et leur planification financière et l'USS peut à nouveau présenter son analyse détaillée de l'état des finances cantonales. En plus des indicateurs généraux, nous avons examiné de plus près les domaines de dépenses qui sont en augmentation, comme la formation et les soins de longue durée.
La haute conjoncture économique des dernières années s'est aussi ressentie dans les caisses cantonales. Ainsi en 2018, les recettes fiscales des cantons ont augmenté globalement de 3,6 % par rapport à 2017, soit nettement plus que la croissance de la création de valeur. Pour 2020, la majorité des cantons continue de tabler sur une croissance des recettes fiscales, mais elle s'annonce nettement plus faible. Ce ralentissement s'explique en partie par des perspectives économiques un peu moins roses, mais il est aussi un signe avant-coureur de la mise en œuvre de la réforme fiscale RFFA dans les cantons (dans la plupart des cantons, les premières révisions des lois fiscales cantonales entreront en vigueur dès le 1.1.2020). Ainsi, sept cantons au total s'attendent même à une baisse des rentrées fiscales, malgré une économie en croissance. À Bâle-Ville, la baisse devrait être de près de 5 %. C'était pourtant l'un des cantons pour lesquels la réforme nationale semblait taillée sur mesure pour permettre une mise en œuvre sans incidence sur les revenus.
Baisse des excédents malgré le peu d'investissements
En 2020, les excédents budgétaires structurels (c.-à-d. le résultat du compte financier corrigé des fluctuations de la conjoncture et des fluctuations exceptionnelles) devraient diminuer dans 15 cantons sur 26. Logiquement, cela devrait découler d'une augmentation des dépenses d'investissements. En effet, d'une part, de nombreux domaines ont besoin d'investissements de taille (en particulier dans la formation et les soins de longue durée) et, d'autre part, le contexte persistant des taux d'intérêt bas ou négatifs ainsi que le ralentissement de l'économie appellent une politique active d'investissements. Pourtant, c'est tout le contraire qui se passe dans de nombreux cantons : selon les budgets présentés, les dépenses d'investissements devraient diminuer dans 12 cantons sur 26 en 2020. La détérioration des résultats structurels du compte financier ne s'explique donc pas par une politique active d'investissements, mais elle découle bien souvent des mises en œuvre cantonales de la RFFA. Cette évolution est préoccupante : la transformation des systèmes cantonaux de l'imposition des entreprises ne devrait pas être dévoyée dans le but de raviver la concurrence fiscale intercantonale à un niveau encore plus bas.
Grosse erreur budgétaire, grosse fortune
Dans ses publications antérieures sur les finances cantonales, l'USS avait déjà constaté que l'exactitude de la budgétisation laissait à désirer dans presque tous les cantons. Ceux-ci se montrent en effet presque toujours trop pessimistes dans leurs budgets et se retrouvent systématiquement avec de meilleurs résultats. Ces erreurs budgétaires ont même empiré dans l'exercice financier 2018 et atteignent 5,5 % en moyenne suisse (c.-à-d. que les comptes des cantons sont, concernant les recettes globales, de 5,5 % supérieurs aux résultats budgétisés). L'USS constate également de façon répétée que les cantons noircissent systématiquement le tableau, non seulement en établissant leur budget, mais aussi lorsqu'ils font état de leur fortune. Souvent, l'endettement est grossi parce que la fortune n'est pas prise en compte en lien avec la dette brute ou, à tout le moins, pas dûment comptabilisée. Correctement déclarée, la fortune nette consolidée des cantons (fortune moins dettes brutes) se montait à presque 32 milliards de francs en 2017. Elle a continué d'augmenter de 10 % entre 2017 et 2018 pour atteindre près de 35 milliards de francs (!).