Environ un quart des travailleuses et travailleurs a des enfants âgés de moins de 15 ans. Ils sont, depuis un mois, directement touchés par les fermetures d’écoles et de garderies, mais aussi par l’impossibilité pour les grands-parents d’assumer des tâches de garde. Ces derniers apportent en effet une contribution substantielle en la matière : l’Office fédéral de la statistique évalue leurs prestations à 160 millions d’heures par an.
La conciliation entre travail et vie familiale pendant la crise actuelle place les parents dans une situation difficile. Seule une petite partie des salarié-e-s en activité peut réellement déléguer la garde des enfants. En fonction de l’âge et de l’autonomie des enfants, de nombreuses familles sont mises à rude épreuve depuis des semaines et il est à craindre que la charge retombe largement sur les femmes.
L’obligation de maintenir le versement du salaire pour les employeurs lorsque l’employé-e est partiellement ou entièrement empêché de travailler en raison d’une obligation de garde est controversée sur le plan juridique. De premiers exemples montrent que les manières de faire varient fortement. L’USS s’est donc engagée très tôt pour une garantie fédérale des salaires en cas d’absences dues à la garde des enfants. Le 20 mars, c’est-à-dire une semaine après la fermeture des écoles, le Conseil fédéral a entendu cette demande et introduit une allocation pour perte de gain destinée aux parents.
Allocation perte de gain pour parents : une solution partielle
L’allocation perte de gain introduite protège les parents contre une baisse de salaire lorsqu’ils ne peuvent pas effectuer leur travail comme de coutume en raison de l’absence de solution de garde pour les enfants. Elle est payée sous la forme d’indemnités journalières, comme c’est toujours le cas pour les allocations perte de gain, à partir du quatrième jour d’absence totale ou partielle pour cause de garde, et au plus tôt à partir du jeudi 16 mars 2020. Le droit aux prestations dure jusqu’au moment où les parents peuvent à nouveau travailler (ou travailler à leur taux usuel) parce que les mesures prises par les autorités sont levées ou que la garde peut être assurée autrement. Vous trouverez des renseignements détaillés dans la notice d'information de l'USS à ce sujet (voir ci-dessous).
Le Conseil fédéral a prévu que l’allocation doit être demandée par chaque parent séparément auprès d’une caisse de compensation AVS. Il faut, pour cela, une liste des jours d’absence pour cause de garde des enfants, une attestation émise par l’employeur de la perte de salaire, les fiches de salaire des trois derniers mois et, pour les parents d’enfants en âge préscolaire, une confirmation écrite de la fermeture de la garderie. Si l’employeur continue à payer le salaire pendant cette période, il peut demander le paiement des indemnités directement à la caisse, comme c’est souvent le cas pour le congé maternité.
Grâce à cette allocation pour parents, ceux-ci reçoivent 80 % de leur salaire brut (au maximum 196 francs par jour). Lorsque les deux parents travaillent, ils peuvent se répartir les jours de garde comme ils l’entendent, mais pour chaque jour, seul un parent peut bénéficier de l’allocation.
L'indemnité n'est pas versée automatiquement. Les salarié-e-s doivent en faire la demande auprès de la caisse de compensation AVS compétente. Les formulaires se trouvent en ligne sur la page d'accueil des caisses de compensation. Si c'est l'employeur qui fait la demande, il peut télécharger les documents au même endroit. Les personnes qui ont plusieurs employeurs, eux-mêmes affiliés à différentes caisses de compensation AVS, ne doivent déposer leur demande qu'auprès d'une seul de ces caisses. Mais celle-ci doit comprendre les fiches de salaire de tous les employeurs. Celles et ceux qui sont à la fois employé-e-s et indépendant-e-s doivent faire la demande auprès de la caisse de compensation à laquelle ils cotisent comme indépendant-e. Lorsque les deux parents ont droit à l'allocation, une seule caisse est compétente, à savoir celle du premier des deux qui a fait la demande.
Environ un tiers des travailleuses et travailleurs effectuent l’ensemble de leurs tâches en télétravail depuis mi-mars et 20 % le font au moins en partie, selon un sondage de Sotomo pour la chaîne alémanique SRF (disponible en allemand seulement). Même s’ils télétravaillent, les parents qui doivent garder leurs enfants ne peuvent bien souvent assurer qu’une partie des prestations habituelles. Si cela conduit à une réduction du salaire, l’allocation perte de gain pour parents peut être sollicitée. Il est donc important de bien discuter avec l’employeur du travail qui peut réellement être fait depuis le domicile.
Autres questions et réponses : Notice d'information de l'USS sur les APG pour parents
Trop peu connue
Les demandes d’allocations peuvent être déposées depuis trois semaines et les premiers versements ont lieu depuis Pâques. Il n’est techniquement pas possible, à ce jour, d’évaluer combien de parents ont fait valoir leurs droits pour compenser des absences au travail dues à la garde des enfants. Un premier bilan intermédiaire sur la base des expériences des fédérations de l’USS montre que les employeurs communiquent de manière très variable la façon dont les parents salarié-e-s doivent gérer la charge conjuguée du travail et de la garde. L’allocation pour parents n’est que rarement évoquée, et très peu de personnes concernées en ont connaissance. Certains employeurs progressistes reconnaissent le temps consacré à la garde comme du temps de travail. À l’inverse, nombreux sont ceux qui demandent aux parents de puiser dans leurs jours de vacances pour compenser. Dans d’autres cas, certains employeurs qui ont un besoin impératif de leur personnel (en particulier dans le secteur de la santé) exigent une présence ininterrompue et demandent la mise en place d’offres de garde d’urgence. Enfin certains employeurs menacent de licenciement les parents qui ne pourraient pas se présenter en raison de problèmes de garde – et dans quelques cas malheureusement, la menace a été mise à exécution.
Ceci conduit à la situation paradoxale que les parents se sentent surchargés en cette période, quand bien même une partie de la solution existe bel et bien. Il n’est pas surprenant que l’étude de Sotomo de début avril arrive à la conclusion que la pression due à l’école à domicile et à la garde des enfants s’est accrue au cours des deux dernières semaines. Cette situation est aussi problématique du point de vue de la politique d'égalité. Pour l’USS, la question de la garde des enfants n’est pas une affaire privée. Elle s’est donc engagée pour la solution simple de l’allocation pour parents. Il appartient maintenant aux employeurs d’en faire usage au lieu d’accroître le stress pesant sur les parents qui travaillent.